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Briefs and position statements Monday, November 24, 2025

Projet de loi 1, Loi constitutionnelle de 2025 sur le Québec

Le Barreau du Québec prévient que la Constitution doit respecter l’état de droit

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Le Barreau du Québec exprime de sérieuses préoccupations sur le projet de loi  1, en raison du nombre et de l’importance des enjeux qu’il soulève relativement à la protection du public et l’état de droit québécois. «  Plusieurs aspects de ce projet de loi menacent l’équilibre des pouvoirs, la prévisibilité juridique, la protection des droits et libertés fondamentaux et l’accès à la justice, souligne le bâtonnier du Québec, Marcel-Olivier Nadeau. Un projet de loi qui érige une constitution en «  loi des lois  » au Québec, c’est un acte historique qui exige de la prudence et des discussions ouvertes et approfondies sur sa portée et sa légitimité.  »

Le Barreau a déposé un mémoire sur le projet de loi  1, la Loi constitutionnelle de 2025 sur le Québec, qui édicte la Constitution du Québec, la Loi sur l’autonomie constitutionnelle du Québec et la Loi sur le Conseil constitutionnel et en modifie plusieurs autres.

Des contre-pouvoirs affaiblis

La Loi sur l’autonomie constitutionnelle du Québec limite les moyens mis à la disposition des citoyens pour contester des dispositions de la loi qu’ils jugent arbitraires ou contraires à leurs droits. En effet, elle empêchera plusieurs organismes de la société civile, dont les ordres professionnels, d’appuyer de telles démarches. «  Une telle interdiction est irréconciliable avec un état de droit fort et une saine démocratie, déclare le bâtonnier Nadeau, et porte atteinte aux valeurs fondamentales de justice et de transparence du Québec.  »

Mise à l’épreuve de la séparation des pouvoirs

De plus, le projet de loi introduit le Conseil constitutionnel, une nouveauté qui portera atteinte à la séparation des pouvoirs et à l’indépendance des tribunaux. Le Conseil sera chargé de donner des avis sur l’interprétation de la Constitution du Québec et les conséquences de certaines initiatives fédérales. Son rôle et ses pouvoirs demeurent ambigus, et ses membres seront recommandés par le premier ministre pour leur opinion politique davantage que pour leurs compétences juridiques. Permettre au gouvernement de concentrer dans les mains de quelques membres choisis un pouvoir d’interprétation aussi vaste ouvre la porte à un affaiblissement du pouvoir judiciaire, estime le Barreau. Les avis du Conseil pourraient influencer ou concurrencer les décisions des tribunaux, compromettre la clarté et la prévisibilité du droit et miner la confiance du public envers la justice. En ce sens, l’Ordre s’inquiète du risque de confusion entre les pouvoirs politique et judiciaire. 

Affaiblissement des droits et libertés

Le Barreau relève aussi des enjeux majeurs dans la hiérarchisation des droits proposée par le projet de loi, qui entend donner à la Constitution québécoise préséance sur la Charte canadienne des droits et libertés. Le Barreau rappelle que la Charte des droits et libertés de la personne, adoptée à l’unanimité il y a 50  ans par l’Assemblée nationale, est née d’un dialogue démocratique approfondi, une démarche qui fait ici défaut. Chaque modification apportée à la Charte québécoise tend à fragiliser son statut de quasi constitutionnalité, la force normative de la Charte reposant sur la stabilité et la cohérence de ses principes fondamentaux. Or, toute révision qui altère l’équilibre entre les droits ou en réduit la portée contribue à affaiblir cette fonction structurante et à la rapprocher d’un régime législatif ordinaire plutôt que de la maintenir comme instrument de garantie supérieure des droits et libertés.

Des protections illusoires

Certaines dispositions visent à réaffirmer des droits spécifiques comme le droit à l’interruption volontaire de grossesse, l’égalité entre les femmes et les hommes, et l’accès aux soins de fin de vie. Mais ces ajouts sont surtout symboliques et n’offrent pas une protection accrue. Leur inclusion dans le projet de loi pourrait même fragiliser des acquis déjà reconnus par les tribunaux en ouvrant la porte à de nouveaux débats judiciaires quant à leur interprétation. 

L’absence des Premières Nations et des Inuit

Le Barreau déplore, enfin, que le législateur n’ait pas saisi l’opportunité d’intégrer au projet de loi 1 la pleine reconnaissance juridique des peuples autochtones. Bien que le préambule évoque leurs droits ancestraux et linguistiques, ces passages, symboliques, n’ont aucune valeur contraignante et revêtent un caractère interprétatif. L’absence de dispositions claires affaiblit la protection juridique des Premières Nations et des Inuit et crée une grande incertitude quant à leurs recours. 

L’Ordre estime que toute réforme constitutionnelle doit être envisagée avec prudence, transparence et inclusivité, et s’inscrire dans une démarche respectueuse des droits fondamentaux, de la séparation des pouvoirs, de la prévisibilité juridique et de la participation citoyenne.

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