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Articles jeudi 19 mai 2022

Bonifier son offre de services grâce à la médiation

Par Emmanuelle Gril

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Les avocats font partie des professionnels autorisés à pratiquer la médiation. Celle-ci fait d’ailleurs de plus en plus d’adeptes parmi les membres du Barreau du Québec. Tour d’horizon.

Me Martin Hovington, directeur du Service de la qualité de la profession au Barreau du Québec, constate qu’il y a effectivement un intérêt grandissant pour la médiation parmi les avocats. « On assiste à un changement de culture et, en tant qu’ordre professionnel des avocats, le Barreau essaie d’être un leader dans cette transformation qui contribue à favoriser l’accès à la justice », dit-il.

Il remarque que non seulement les jeunes avocats semblent particulièrement attirés par la médiation, mais les juristes expérimentés également. « Leur connaissance poussée du système de justice fait en sorte qu’ils savent bien que les tribunaux ne constituent pas toujours la meilleure solution dans un dossier », indique Me Hovington. Il remarque que les avocats médiateurs ont tendance à pratiquer la médiation à temps plein. « Ils souhaitent sortir de la formule du débat contradictoire devant la cour pour s’orienter vers la recherche de solutions extrajudiciaires et négociées ».

Ainsi, le nombre des médiateurs va croissant au fil des ans et les avocats constituent une grande partie de ceux-ci. On remarque aussi que les avocats accrédités en médiation sont majoritairement des femmes (61,09 %, en date du 1er mai 2021). En médiation familiale, elles représentent même 77,80 % (en date du 1er mai 2021) des avocats accrédités par le Barreau du Québec.

À la recherche d’une solution négociée

Membre du Barreau du Québec depuis 1991, Me Miville Tremblay fait partie des pionniers qui ont opté pour une pratique entièrement consacrée à la médiation. « En 1998, après avoir suivi la formation pour devenir médiateur familial, j’ai réalisé que ma vision du droit correspondait davantage à la démarche d’un médiateur. Ce type de pratique m’a littéralement interpellé et je m’y suis consacré à temps plein dès l’année suivante », se souvient-il.

Convaincu d’avoir fait le bon choix, après la médiation familiale, il a également suivi la formation pour devenir médiateur dans le domaine civil et commercial. « La différence par rapport au familial, qui est subventionné par Québec, c’est que ce type de médiation n’est pas gratuit. Il y a donc un travail à faire pour développer ce marché, l’expliquer et mieux le faire connaître aux clients », mentionne Me Tremblay qui consacre actuellement 80 % de son temps à la médiation familiale et 20 % à la médiation civile et commerciale.

Miville Tremblay apprécie tout particulièrement le fait que le pouvoir décisionnel est remis aux parties, ce qu’il assimile à une forme d’éducation et de justice sur mesure. « C’est aussi une façon de les amener à comprendre la justice et pas seulement à la subir. Lorsque les gens peuvent décider eux-mêmes de leur sort, ils sont plus satisfaits. On sort du rapport de force pour intégrer une solution négociée », fait-il valoir.

Me Tremblay estime toutefois que la médiation nécessite un changement de posture de la part des avocats, autrement dit une attitude neutre et la remise du pouvoir décisionnel entre les mains des parties. « C’est aussi un enjeu social important dans la mesure où l’on accompagne les individus afin qu’ils se responsabilisent et prennent en main la réponse à leur problème », insiste-t-il.

Il considère néanmoins que ce type de pratique n’est pas fait pour tout le monde, dans la mesure où cela nécessite un certain état d’esprit. « Mais il y a de la place pour la diversité. Tous les médecins ne sont pas nécessairement chirurgiens, alors pourquoi tous les avocats devraient-ils être médiateurs? »

D’ailleurs, les clients ne sont pas tous ouverts non plus à la médiation et certains préfèrent se rendre devant les tribunaux pour régler leur litige. C’est pourquoi il arrive fréquemment à Me Tremblay de référer des dossiers à des confrères lorsqu’il constate que la médiation n’est pas appropriée.

Selon lui, la vision qu’on peut avoir de l’avocat « pitbull » agressif et batailleur doit évoluer. « Les justiciables ont besoin de solutions, ce qui signifie qu’il faut leur apporter de l’aide et de l’accompagnement dans ce cheminement. Les membres de notre profession peuvent parfaitement jouer ce rôle. Nous sommes d’ailleurs la profession la mieux placée à cet égard, puisque nous possédons les connaissances nécessaires sur les aspects légaux et juridiques, les règles d’ordre public, etc. », explique-t-il.

Il ajoute qu’aujourd’hui les choses ont changé, la population étant mieux informée et ayant accès aux textes de loi et à la jurisprudence. « Mais nous, les avocats, détenons le savoir-faire. Et si la confiance du public dans le système judiciaire s’effrite, la médiation est une excellente façon de la restaurer. Nous devons faire connaître ce que nous pouvons faire en dehors des tribunaux, et les différentes solutions qui s’offrent aux justiciables », fait valoir Me Tremblay.

Devenir médiateur

Membres inscrits au Tableau de l’Ordre au 31 mars 2022 et détenant une accréditation

Type d’accréditation Nombre
Médiation civile, commerciale et travail 1 114
Médiation aux petites créances 631
Médiation familiale 603 dont 74 avec engagements et 529 définitives

Note

En date de mai 2022, on comptait 29 124 membres au Tableau de l’Ordre.

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