Aller au contenu

Dossiers lundi 27 juin 2022

Me Ryan Hillier

Réimaginer la pratique du droit en se posant la question : où serons-nous en 2050?

Par Marie-Hélène Paradis

Partagez

« La pandémie nous a permis de prendre conscience de beaucoup de choses, de nouvelles réalités se sont présentées et le fait de devoir faire les choses autrement nous a ouvert les yeux sur un avenir à la mesure de ces nouvelles préoccupations. » C’est ainsi que Me Hillier a mis la table pour cet exposé des plus intéressants.

Ryan Hillier a abordé le sujet de sa conférence en attaquant d’emblée la nécessité de nous adapter, en citant avec humour son propre attachement immodéré au téléphone Blackberry. « Tous peuvent développer leur capacité à évoluer et même réussir à passer de l’utilisation du Blackberry au téléphone intelligent! », déclare-t-il. Sa présentation comportait quatre thèmes qui sont, selon lui, quatre grandes tendances pour arriver à tenir la route et faire progresser la profession d’avocat vers 2050.

 

Me Ryan Hillier

1. L’impact des nouvelles technologies sur la profession

Il est évident que les nouvelles technologies ont un impact sur la façon de travailler, mais celles-ci ne sont pas la source du changement, selon Me Hillier. Les nouvelles technologies constituent l’un des outils incontournables pour favoriser une amélioration marquée dans la prestation des services juridiques, avance-t-il. Elles sont avant tout un élément clé de la démocratisation de la pratique du droit et donnent accès à une nouvelle façon de rendre des services juridiques. Elles aident à rejoindre des clientèles éloignées qui n’auraient pas accès autrement au système de justice; à cet égard, on pense par exemple aux citoyens résidant dans le Grand Nord.

Encore une fois, la pandémie a permis de réaliser qu’on pouvait être efficace en travaillant à distance. « Nous faisons partie d’un écosystème plus grand et le fait d’assimiler les technologies des communications nous aide à travailler autrement et plus efficacement », explique Me Hillier. « Ces technologies permettent de travailler à distance et, par conséquent, de baisser les coûts d’exploitation d’un cabinet et d’avoir ainsi une gestion saine. Pensons au gain de temps, à la flexibilité, à l’autonomie et à la productivité accrue comme avantages incontournables. Le recrutement peut aussi être avantagé, car nous savons très bien que les jeunes professionnels ont de nouvelles exigences en ce qui a trait à la qualité de vie et à la liberté procurée par le travail à distance. »

2. Les nouveaux modèles d’affaires

Le conférencier estime que les modèles d’affaires seront propulsés par la réalité postpandémique. En effet, avec une utilisation de plus en plus fréquente des technologies, une culture organisationnelle nouvelle correspondant aux exigences des travailleurs et une approche basée sur les besoins des clients, les cabinets n’auront pas d’autre choix que d’évoluer. Bien sûr, cette évolution se fera différemment selon qu’il s’agisse d’un grand cabinet ou d’un plus petit.

Selon Me Hillier, l’expertise dans un domaine de droit particulier n’est plus garante de succès pour l’avocat et elle doit être complémentée par d’autres habiletés, dont l’utilisation de la technologie. L’avocat qui réussit aujourd’hui n’est plus seulement celui qui possède la plus grande expertise dans son domaine. C’est plutôt celui qui maîtrise une panoplie de notions et d’habiletés et, surtout, qui a su placer son client au centre des priorités de son modèle d’affaires, contrairement à l’avocat d’autrefois qui bâtissait sa pratique autour de ce qui l’intéressait, lui.

En matière de modèles d’affaires, il donne quelques pistes de solutions pour alimenter les réflexions : penser à une structure « inc. » plutôt que SENCRL, proposer une offre juridique comprise dans une pratique multidisciplinaire, trouver des capitaux pour innover, établir des partenariats avec les fournisseurs de services professionnels alternatifs pour compléter l’offre de service, créer quelque chose d’entièrement novateur. Il faut, enfin, repenser le modèle de la facturation à l’heure…

Me Hillier a quant à lui créé un modèle d’affaires qui correspond à sa vision. Novalex inc. est un cabinet un pour un, c’est-à-dire, que pour une heure facturée à un client, il y a une heure donnée en travail pro bono. Novalex s’est donné comme mission de rendre les services juridiques de pointe accessibles à tous.

3. Le rôle de l’avocat dans la société de demain

« L’avocat sera appelé à jouer un un rôle beaucoup plus important dans la société moderne et il portera plusieurs chapeaux. Le sens de la responsabilité sociale a toujours été au centre de la profession et notre bagage d’expériences ainsi que nos connaissances sont des atouts majeurs et bénéfiques pour celle-ci », affirme Me Hillier. 

Avec l’accélération des enjeux sociaux et environnementaux majeurs, l’avocat occupe une position privilégiée pour devenir un vecteur de changement social dans une société en pleine mutation. Me Hillier précise que ce rôle dépasse ici le simple compte des heures pro bono, et qu’il s’agit plutôt de l’impact social directement associé à la raison d’être de la pratique. Dans cet ordre d’idées, il décline les différentes facettes du rôle crucial de l’avocat au sein de la société de demain : préservation et primauté du droit, élaboration de nouvelles lois et nouveaux règlements, mise en vigueur et, le cas échéant, participation aux débats publics sur les nouvelles propositions législatives, amélioration de l’accès à la justice. La contribution de l’avocat peut se faire à travers de multiples structures.

4. La santé mentale au cœur de nos priorités

Peu importe la profession, l’amélioration de la santé mentale fait partie des objectifs à travailler. La profession d’avocat figure parmi les trois professions les plus touchées par les problèmes de toxicomanie et présente des taux de dépression et de suicide supérieurs à ceux du grand public. Quelques chiffres éloquents :

  • 58 % des avocats au Canada ont connu un stress important et un épuisement professionnel;
  • 48 % ont ressenti de l’anxiété;
  • 26 % ont souffert de dépression;
  • 40 % des étudiants en droit ont vécu un épisode de dépression pendant leur baccalauréat.

Il va sans dire qu‘il faut améliorer l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, mais comment y parvient-on? Me Hillier a lui-même vécu des problèmes de santé mentale et confie qu’il faut d’abord établir ses limites, accepter l’inconfort, demander de l’aide, fraterniser avec d’autres avocats, utiliser la technologie, gérer mieux le temps et surtout s’accorder les mêmes privilèges que l’on concède aux autres.

Me Hillier conclut en soulignant qu’il faut discuter de tous ces changements et de l’évolution de la société pour bien vivre et pour faire partie de la solution afin de contribuer à un avenir meilleur qui rendra service à la société.

Partagez